Discours veganiste et copains carnistes

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Discours veganiste et copains carnistes

Aujourd’hui j’ai parlé à mes potes (on a un discord toussa). Des copains à moi, carnistes dans la majorité (2 végétariens). Et l’un d’eux m’a envoyé la page de Herta, pour me dire « hey regarde, ils font plein de super bouffe sans viande maintenant ». J’ai répondu que leur produits étaient en majorité végétariens, donc que ça ne me convenait pas. Au-delà de ça, je suis un peu le cul entre deux chaises. Parce que c’est bien que Herta développe des nouveaux produits sans produits animaux et faut soutenir ce genre de choses.
Et d’un autre côté, ça me fait mal d’acheter leurs produits parce qu’ils sont à l’origine de l’enfer des animaux. Surtout avec la récente affaire mise en avant par L214.

Et j’ai dit un truc  : C’est surtout végétarien, donc pareil que la viande. 

Du coup, on me répond que je suis dure, que c’est quand même différent. Y a du lait, mais c’est pas grave, au moins, y a pas de viande. On me dit moralisatrice et faisant des jugements de valeurs. Alors qu’en soi, clairement, il n’y en avait pas. 

Plus de 40% […] est issue des vaches laitières réformées

Je veux dire bordel, plus de 40% de la viande qu’on bouffe est issue des vaches laitières réformées. On ne peut pas dire que le lait soit si différent que ça de la viande. La viande pas chère, c’est l’industrie du lait, c’est comme ça, c’est factuel, l’un alimente l’autre.

Bref, comme vous le savez, quand on parle véganisme, il faut y mettre les mots. Il faut avoir minimum un bac +5 en littérature et en argumentation et y mettre les formes avec d’infinies précautions. Tellement qu’il faut au moins 3 paragraphes d’introduction pour être certain que ton interlocuteur ne prenne pas tes paroles comme moralisatrices avec des jugements à l’intérieur. 

Il faut avoir minimum un bac +5 en littérature

Je leur rappelle qu’avant d’être végane, j’étais aussi carniste et que c’est un chemin plus ou moins long. Une déconstruction complexe puisqu’on est né et qu’on a tous évolué dans une société qui nous rabâche que c’est une norme. 

Et bref, on me ressort ma phrase citée plus haut en « tu as dit que le lait, c’est comme la viande tu nies les efforts des végétariens ». 

Les 2 végétariens dans mon entourage le sont depuis des années. Et ils n’en parlent pas. Genre, jamais. 

On me dit que je dessers ma cause parce que je mets trop d’émotions. Parce que je fais des jugements de valeurs et que je ne donne pas d’importance à l’effort des autres (encore à cause de ma phrase plus haut).

Du coup, je dis oui, je suis émotive sur cette question, évidemment que je le suis ! Mais je ne fais pas de jugement de valeur. 

C’est simplement que derrière, on torture et on tue des animaux par millions. Sans arrêt, sans cesse, pour un plaisir gustatif. Ce n’est pas un choix qui est personnel et qui n’a aucune conséquence. C’est un choix meurtrier et c’est pour cela que j’ai autant de parti pris émotionnel. C’est pour cette raison que je suis aussi vindicative. 

Je comprends qu’on se cherche des excuses

Pour autant, non je ne dessers pas ma cause. Les gens ne vont pas se mettre à manger plus de viande parce que j’ai dis que l’industrie laitière sert l’industrie de la viande. Je comprends que ça soit dur, parce que ça l’a été pour moi. Je comprends que c’est compliqué de dire « bordel, je paye des gens pour qu’ils torturent des animaux ». Je comprends qu’on se cherche des excuses parce que c’est difficile d’avoir conscience d’être acteur de la tuerie de masse des animaux. Mais si le fait de dire ça dessert ma cause, alors on a un problème plus important que ça. C’est pas parce qu’on va un peu plus loin que d’autres que ça dessert la cause.

Je veux dire, hé merde, ce sont mes potes, de gauche, plutôt bien ancrés extrême gauche d’ailleurs. Ils savent que les avancées, on ne les obtient pas à longueur de caresses sur l’échine de ceux qui torturent, qui agressent, qui oppressent. Les avancées, on les prend. 

Bordel, c’est pareil sur tous les sujets. Faut être gentil surtout avec les gens pour qu’ils changent leur habitudes parce que, les pauvres petits chats, c’est si difficile. Si les féministes n’avaient pas fait exploser un foutu parlement on n’aurait toujours pas le droit de vote. Si les luttes sociales s’étaient toujours passées dans le calme en attendant des droits des grands patrons, on n’aurait jamais rien eu. C’est identique pour les animaux. Le seul truc, c’est que eux, ils n’ont pas la parole et ils ont besoin de gens pour les défendre. 

Et forcément, quand tu défends une catégorie de personne, on te prend pour un grand moralisateur alors que tu essaies juste de défendre les plus opprimés de cette planète.

Ça me bouffe qu’on voie en moi seulement des jugements de valeurs. Je n’ai rien à gagner à ça. C’est épuisant de devoir prendre d’infinies précautions pour ne heurter personne alors que meurent des millions d’animaux pour une bouffe dont on pourrait se passer facilement, pour un potentiel gustatif et qui nous empoisonne en plus ! 

Finalement, ils me font un grand procès d’intention.

« ok pour manger » ou « pas ok pour manger » c’est arbitraire

J’ai posé une question pour les végétariens de cette discussion. Après avoir refait un couplet entier pour nuancer les propos que je tiens et bien souligner que je ne veux blesser personne et que je sais que le véganisme est compliqué à appréhender à cause de la façon dont on a été élevé, la façon dont on voit les animaux, la façon dont on nous a appris à cuisiner, la façon compliquée de se procurer des produits facilement et à réapprendre énormément de choses. Je le dis et le répète, c’est un chemin, qui peut être long et je comprends le temps qu’il faut pour ce changement.

Je leur demande donc : Être végétarien, c’est déjà avoir pris conscience du problème des élevages. Comprendre que les élevages sont juste là pour engraisser et tuer les animaux en masse et de surcroît dans des conditions désastreuses (petit ou grand, local ou pas. C’est pareil partout). La viande de porc (par exemple) est produite dans des conditions ignobles alors même qu’ils sont plus intelligents que les chiens. Cette classification des espèces dans les « ok pour manger » ou « pas ok pour manger » est arbitraire et ancrée dans les esprits.

Bref, les végétariens ont, selon moi, accompli le plus gros du taf : la déconstruction de base de notre mode de vie et de la production de notre nourriture.

Mais alors si ce chemin est engagé, pourquoi ne pas continuer sur la voie des produits laitiers ?

Alors ensuite, je fais un petit disclaimer, évidemment. Je parle de véganisme, je suis OBLIGÉE de faire des disclaimers. Du coup, je me retape un paragraphe pour bien qu’iels comprennent que la suite n’est pas là pour faire un jugement de valeur. Je vais m’aventurer sur les possibles raisons sans pour autant les leur attribuer. Je suis évidemment consciente de l’aspect individuel de chacun et que par conséquent, les raisons de l’un ne sont pas les raisons de l’autre.

  • Est-ce que c’est le fait que l’industrie laitière soit si obscure qu’elle ait fait croire que les vaches produisent naturellement du lait ? Genre elles (les industries) ont carrément mis les vaches dans des cases « vache laitière », « vache à viande ». Je me demande d’ailleurs si c’est pour les évolutions génétiques qu’on leur fait subir (mamelles difformes pour le lait, et développement musculaire accrue pour la viande)?
  • Est-ce que c’est dû à la légende urbaine créée par le marketing du lait qui dit que c’est bon pour la santé ? 
  • Est-ce que c’est le marketing laitier qui occulte qu’il faut un bébé pour faire du lait ? 
  • Est-ce que c’est le fait que la viande est clairement issue d’un meurtre alors que le lait, on le voit pas forcément de prime abord ? Comme c’est plus vicieux (la viande l’est aussi, on attribue d’ailleurs des termes qui éloignent les animaux du produit viande. On ne dit pas viande de vache, mais viande de bœuf. On ne dit pas côte de cochon, mais côte de porc. On ne dit pas poule rôtie, mais poulet rôti. Et pourtant, c’est exactement ça la viande. des poules, des cochons, des vaches.).

Mais dans l’esprit, forcément, la viande, c’est du muscle (enfin pour les bons et chers morceaux ), ça provient d’un corps mort. Alors que le lait, c’est synonyme de vie ? On ne voit pas du tout l’industrie qu’il y a derrière ?

Ou est-ce que c’est une histoire de goûts ? Le fromage, c’est tellement bon qu’on ne pourrait pas s’en passer. Mais du coup, cette déconstruction dont je parlais au début n’a finalement pas eu lieu dans ce cas là. Donc je ne pense vraiment pas que ce soit ce dernier point, c’est illogique…

Ils me parlent du fait de se donner des excuses. Que du coup je tape sur les gens en disant qu’ils se donnent des excuses, que c’est frustrant parce qu’ ils ne sont pas forcément au point dessus mais ça ne les empêche pas d’avoir une vision. 

Nan mais ils me disent qu’ils ont une vision tout en mangeant leur steak arrosé de lait.  

Les végé ou végan, ils ne parlent jamais.

Du coup, je ne la joue pas frontale, il ne faut pas, faut caresser. Je leur parle de ma période carniste et de la façon dont je voyais les choses à l’époque.
Je dis ça parce que c’était mon cas. Je me cachais derrière des excuses avant. Et puis bon, je n’avais jamais eu de discussions avec des végans aussi. Donc forcément, pour me poser des questions, c’est beaucoup plus compliqué.

Les végé ou végan, ils ne parlent jamais. Ils se taisent et ne font pas profiter les autres de ce qu’ils pensent. Alors même qu’en face, il y a des gens qui sont en demande d’infos -je comprends aussi leur fatigue maintenant-.

Quand je lisais un végan qui écrivait : « tu aimes les animaux, mais tu manges de la viande, donc tu n’aimes pas les animaux », j’aurais aimé avoir une discussion. Parce que je trouvais ça injuste. Mais aujourd’hui, je comprends. Et clairement, je me trouvais juste des excuses parce que je voulais être quelqu’un de bien mais mes actions montraient carrément le contraire.

C’est pour ça que je dis ça. Parce que c’est exactement comme ça que je voyais les choses.

Si un jour ils ont le même déclic que moi, ils regretteront de n’avoir pas changé plus tôt !

Alors on m’oppose le fait que mes idées et ma façon de voir les choses ne portent pas. Qu’ils préfèrent la façon de parler de ma copine (elle fait partie de L214 Rennes et Anonymous for the voiceless, elle s’est beaucoup intéressée à la façon de parler aux gens, aux carnistes pour leur permettre de se poser des questions par eux même, pour ne pas les figer et qu’ils se renferment. Évidemment, elle prend des précautions lorsqu’elle parle. Et je n’en prends peut-être pas autant qu’elle). En même temps, ils me connaissent depuis 15 ans. Ils savent que ce genre de chose m’affecte particulièrement. Je ne suis pas la plus courtoise dans mes propos et du coup, ils me prêtent immédiatement des intentions qu’ils croient être les miennes mais qui ne le sont pas.

En fait, c’est beaucoup plus compliqué de parler véganisme à des potes qu’à des inconnus. Et presque impossible à la famille.

J’aurais aimé qu’un végan me parle à l’époque. J’aimerais bien que mon moi d’aujourd’hui foute la misère à mon moi de l’époque. Je suis tellement triste d’avoir mis tant de temps à changer. Aujourd’hui je regrette de n’avoir pas pris cette décision plus tôt. Parce que pendant que j’étais naïve, toutes ces années, des animaux sont morts pour me permettre d’apprécier une sensation gustative de quelques secondes. ça ne le vaut pas ! J’aimerais bien que mes potes changent. Si un jour ils ont le même déclic que moi, ils regretteront de n’avoir pas changé plus tôt ! Ils pleureront les années perdues par leur égoïsme.

Bref, comme tous ces sujets, le véganisme, l’effondrement, l’écologie, on trouvera toujours un mur face à nous. Sauf que là, ce sont mes potes. J’ai peur, je suis en colère et ils ne m’aident pas. On a fini cette discussion sur des « on a l’impression qu’il n’y a que toi qui vois la vérité absolue » et  » c’est pas parce qu’on n’est pas constamment en train d’en parler qu’on ne pense pas la même chose ». Mais ils continuent de manger de la viande et boire du lait. 

Je ne sais pas comment vous faites, vous qui me lisez, avec vos potes, avec vos familles, avec les gens en général. Mais vraiment, je n’ai qu’une envie, me terrer dans un coin à la limite d’une vie d’ermite. L’humanité me tue.

Liens pour aller plus loin :
viande de bœuf ? de la vieille vache (titre d’article ridicule, la vache laitière réformée est très très jeune.)
Selection génétique laitiere (pdf)
la sélection génétique intrarace
Selection génétique eleveurs laitiers
tout savoir sur la sélection génétique

Vidéos :
Un speech d’un vegan très intéressant. (sous titres français disponibles)
méthodes des élevages français

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